lundi 20 février 2012
Vesper
Il se fait tard, sans que je m'en sois aperçue. Il est l'heure de laquelle on dit couramment qu'elle est longue, et triste singulièrement aux personnes âgées et seules. Pourtant deux heures, trois heures, ce sont pour moi des instants, pour peu qu'une relative oisiveté m'y aide.
Cet après-midi me fut une douce journée, passée à flâner et à souffrir…
Derrière la vitre voilée qui remplace – mal – un mur entre les deux pièces que j'habite, une lueur jaune vient de s'allumer. Voici l'heure tout ensemble de souffrir moins, d'apprêter un peu mieux mon visage, d'entendre le téléphone, un choc d'assiettes annonciateur, et des coups de sonnette pour lesquels je ne suis que défi, moquerie et hilarité. Certains jours, je vais jusqu'à dire au fond de moi : " J'emmerde toutes les sonnettes, maintenant ! " Mais ce sont des accès irrévérentiels qui ne vont pas bien loin…
– Tu es bien ?
– Très bien.
– Qu'est-ce que tu écris ?
– Oh ! rien. Je gratte du papier, et puis je déchire. Quand je ne peux pas faire, je défais.
Ce soir, le ciel se ferme, un souffle, par les hiatus des fenêtres, chante le dégel. Il est l'heure de croiser les rideaux usés par le soleil.
L'étoile Vesper, 1946
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